11septembre 2023
Don de la famille Arnault
Retour à froid sur le don de 10 millions d’euros de la famille Arnault (LVMH) aux Restos du Cœur, qui a été salué, la larme à l’œil, par une ministre, Aurore Bergé, fascinée par le modèle de réussite que constitue tout milliardaire aux yeux des macronistes.
Mais rappelons la réalité des chiffres : que pèsent ces 10millions d’euros face aux 518 millions d’euros que la société LVMH est parvenue, ces 10 dernières années, à soustraire aux impôts selon la Cour des comptes ? Et face aux sommes colossales que le contribuable Bernard Arnault lui-même économise chaque année, grâce aux astuces fiscales ?
L’an dernier, son taux d’impôt sur le revenu n’était que de 14% (soit autant qu’un couple qui gagne 150 000 €/an) sur un revenu imposable de 1,3 milliards d’euros. Soit un impôt acquitté ridicule de 182 millions d’euros. Si Bernard Arnault payait 45%d’impôt sur le revenu (comme le prévoit le barème au-delà de 170 000€) au lieu de 14%, il devrait payer 585 millions et non 182 millions, soit environ 400 millions d’euros d’impôt supplémentaire, 40 fois plus que son don de 10 M€.
Ajoutons que Bernard Arnault possède une fortune de 200 milliards d’euros qui échappe presque entièrement à l’impôt, car elle est principalement composée de ses parts dans des maisons de luxe dont 27% des filiales sont situées dans des paradis fiscaux. Les dividendes qu’il reçoit ne sont quasiment pas taxées grâce à un montage en holding bénéficiant d’un régime particulier. Les 10millions donnés aux Restos ne représentent que 0,005% de cette fortune totale, multipliée par 75 en 25 ans, et qui a augmenté4 fois plus sous Macron qu’en 20 ans ! Si Bernard Arnault payait un simple impôt de 1% de sa fortune totale, cela représenterait 2milliards d’euros, 200 fois plus que le don aux Restos du cœur.
Bref,ce don n’est pas l’acte de « solidarité » d’une « grande réussite », selon les mots d’Aurore Bergé, mais une opération de communication obscène de la part d’un magnat qui sait mieux que personne échapper au fisc. À la charité, arbitraire et dérisoire, des milliardaires, nous préférons la solidarité nationale, formalisée et organisée dans un système d’imposition progressif.
Ceux qui contournent ce système, comme Bernard Arnault, ont une lourde part de responsabilité dans l’explosion de la pauvreté et même de la faim dans notre pays, et dans la défaillance des mécanismes des solidarités censés répondre à ces situations.
Quant au gouvernement, plutôt que de poser des rustines, qu’attend-t-il pour mettre en place un vrai plan de lutte contre la pauvreté ? Il pourrait aussi enfin se décider à taxer le patrimoine des ultrariches et à renforcer la progressivité de l’impôt sur le revenu de sorte qu’il diminue pour 90% des assujettis et augmente pour les plus aisés.